Une photo ?

La mer glissait sur le sable chaud, rafraichissant de ses bras d'écume le sol ardent. Josh marchait le long de la plage, son studio n'était pas loin mais il préférait rester le plus longtemps possible dehors, cherchant des images à mortaliser. Son appareil à la main, il scrutait l'horizon de ses yeux mordorés. Le jeune homme aimait la plage, la lumière y était si particulière, si poudrée que les photos ne pouvaient y être ratées. Mais une belle photo ne lui suffisait pas, Josh cherchait la perfection des lignes, des formes, l'harmonie d'un paysage sans imperfections.
Ses pas laissaient de légères traces sur le sable qui reprenait son teint uniforme après qu'une vague soit passée. Au loin une fine silhouette se déssinait. Elle restait éloignée mais Josh sentait déjà que son appareil allait servir, il ne faisait jamais vraiment attention à la réaction des gens quand ils étaient pris en photo, certains s'énervaient, et le jeune homme éffacait l'image, prenant soin d'en faire une copie discrètement. Ce n'était pas tant par méchanceté, mais surtout parce qu'il éstimait que la beauté transcendait l'homme, comme si une belle photo avait plus de valeur que tout ce qui pouvait se trouver sur terre. Josh était ainsi, naïf parfois, naturel toujours.

Bientôt il distinguait la jeune femme, ses cheveux blonds coulant le long d'un visage fin, ses yeux émeraudes fixaient l'horizon tandis qu'une bouche aux lèvres parfaites creusaient un visage parfait. Sortant son appareil sans rien dire, le jeune homme prit une foulée de photos sans rien dire. Il n'était pas vraiment proche de la jeune inconnue, mais asser pour qu'elle aît pu entendre le cliquetit si particulier d'un appareil photo...

[ petit poste Smile

]

Elle était assise, là, et ne savait même pas pourquoi. Ce matin, elle avait laissé s’échapper la notion du temps. Elle avait tenté de se réveiller de son hibernation. De penser à autre chose. A quoi ? Aucune idée. Elle ne savait pas s’il y avait des cours, ou non. Elle n’y était pas allée, de toutes façons. Elle avait placé dans ses oreilles deux écouteurs blancs qui se perdaient dans ses cheveux ondulés, déversant dans ses oreilles une musique qu’elle n’écoutait même plus. Ce qui n’était pas bon. Alors elle s’était laissée guider par ses pas, errante.

Pourquoi elle était si vide, Lou n’en savait rien. Elle n’avait plus envie de danser, plus envie de jouer, ni même de chanter, aucune envie d’aller trouver quelqu’un pour parler ou pour faire n’importe quoi, pourvu que… Pourvu qu’elle ne s’ennuie pas.

En sortant de l’Académie, elle avait éclaté de rire. Parce qu’elle se trouvait ridicule. Parce que c’était profondément stupide, de se conduire ainsi. De mettre ses neurones en pose, de se mettre en fonction stop, juste parce que… Parce que quoi déjà ? Alors elle s’était mise à courir, sur un fond de « Mission impossible ». Puis elle s’était jetée dans le sable comme s’il était son seul salut. Elle avait vérifié qu’il n’y avait personne, avant. Pensez-vous…

Maintenant, elle était assise, là, et ne savait plus trop pourquoi. Mais elle s’en fichait. Elle regardait le soleil se coucher depuis plusieurs dizaines de minutes, et son souffle avait reprit sa tranquillité. Elle goutait cette fin de journée avec un sentiment de contentement, de béatitude. Mieux vaut être simple, en réalité. Et ce silence, si délicat à son oreille, fut troublé par un fin cliquetis. Elle hésita, en entendit un autre, et fini par tourner sa tête tranquillement vers la source du bruit. Perplexe, elle ne dit rien. Elle l’avait déjà vu. Mais où ? Serait-ce un professeur ? Elle choisit de ne pas se poser plus de question, et de rompre la tranquillité qui régnait là.

« Une photo de moi vaut quelques millions d’euros… »

Elle avait dit cela sans réfléchir. Comme souvent. Avec un regard réprobateur et absolument sérieux. Elle se leva doucement, et, chassant d’une main le sable qui glissait sur elle, elle ajouta, sur un ton accordé à son attitude.

« Naturellement, je demanderais à mon agent de vous appeler, afin qu’il règle ce petit problème… »

Naturellement, une photo d’elle ne valait rien du tout, et elle n’avait absolument pas d’agent. Ceci dit, il n’était pas censé le savoir.

« Une photo de moi vaut quelques millions d’euros… »

Son sourcil droit se leva, elle parlait avec tant d'assurance qu'il y avait cru cet idiot. Ne pouvant s'empecher d'éclater de rire, il déclara dans la foulée :

« Vous avez tout de même la chance d'avoir étée photographiée par le plus grand photographe. Ce n'est pas moi qui le dit évidement, mais tous les journaux spécialisés »

Son ton était tout aussi assuré, sûrement parce que lui il disait la vérité. Josh avait la chance inouï d'avoir percer dans le milieu en quelques années seulement. Son talent était connu et reconnu de par le monde entier. La jeune femme était plus belle qu'il ne pensait, son visage fin laissait sa peau pâle éclairée par le soleil couchant. La lumière était particulière, si particulière que Josh ne pût s'empecher de reprendre quelques clichés.

« Et puis bon....qu'importe le prix après tout, je la revendrais trois fois plus si l'envie m'en prend »

«ce qui ne risque pas d'arrivé » Murmura-t-il à son appareil. Comme si cet objet était vivant, Josh lui accordait une attention particulière, si grande qu'il pouvait passer pour un fou devant certains. Il est vrai que s'extasier devant un appareil photo n'était pas grandement commun...

« Si vous êtes si connue que cela, pourquoi êtes vous seule sur cette plage, sans aucun photographe autour de vous ? C'est étrange »

L'illumination avait enfin eu lieu, Josh avait à peu près compris la “blague” que lui avait fait la jeune inconnue. Comme quoi, il n'était pas si déséspérant que ça. Le jeune homme s'asseya sur le sable, traçant des cercles du bout des doigts.

« Et puis on ne porte pas des maillots bon marché quand une simple photo peut vous rapporter plusieurs millions »

Son ton n'était pas dur, au contraire, il était plutot à l'humour. Josh ne s'énervait pas souvent, il préférait prendre les choses avec du recul..

« Vous avez tout de même la chance d'avoir été photographiée par le plus grand photographe. Ce n'est pas moi qui le dit évidement, mais tous les journaux spécialisés »

« Ohmondieu. On va pouvoir échanger nos autographes… »

Elle avait dit cela sur un ton plus gentiment moqueur qu’ironique. Il semblait dire cela avec toute la simplicité du monde, et ce malgré une phrase qui pouvait paraître orgueilleuse. Sa réponse n’avait donc pas pour but de se moquer méchamment. Il reprit son appareil et prit quelques photos en prime. Elle choisit de ne pas répondre, et de ne pas réagir. Si ça lui faisait plaisir, et que cela ne la gênait en rien, pourquoi aurait t’elle noyé l’appareil –Qui devait d’ailleurs valoir plus qu’une centaine de photos d’elle- ?

Il ajouta quelque chose qui fini dans un murmure à son appareil. Et bien. Elle ne savait pas trop quoi en penser. Et, comme souvent dans ces cas là, elle haussa les épaules pour elle-même, gardant le silence. Le personnage qu’elle avait endossé n’aurait également rien pu répondre.

« Si vous êtes si connue que cela, pourquoi êtes vous seule sur cette plage, sans aucun photographe autour de vous ? C'est étrange. Et puis on ne porte pas des maillots bon marché quand une simple photo peut vous rapporter plusieurs millions »

Il avait comprit. Prise d’un doute, elle regarda dans son dos, puis se maudit. Non, l’étiquette du prix n’était plus là. Hey, sait-on jamais… Lou était quelqu’un de particulièrement distrait. Elle se rassit pour rester à sa hauteur.

« Bon raisonnement. M’enfin, c’est bon d’avoir de l’espoir, hein ? »

Elle afficha un sourire amusé. De toute façon, étant à Earth Sprite, elle était en bonne voie pour avoir sa photo à quelques millions.

[ MORALE DE L'HISTOIRE :: LA DIGESTION ANÉANTIT L'INSPIRATION... ]

« Oh mon dieu. On va pouvoir échanger nos autographes… »

Josh posa son appareil sur le sable blanc de la plage. Il avait fait assez de photos pour la soirée, et d'humeur plutôt loquace, il était partit pour parler pendant plus d'une heure, seul où accompagné. Il lui arrivait souvent de parler seul, il ne se sentait jamais vraiment seul d'ailleurs, comme si une présence l'accompagnait continuellement. Ses yeux flottaient sur l'horizon, allant de gauche à droite, observant les montagnes, puis les vagues, le cadre était magnifique.

« Dommage, aucun de nous deux n'a de stylos. Le destin fait bien les choses. »

Son ton était aussi amusé. Il ne regardait pas la jeune fille avec qui il parlait, à moitiée sur la plage, à moitiée sur l'eau Son regard était doux, ses mains plongeaient dans le sable chaud.

« Bon raisonnement. M’enfin, c’est bon d’avoir de l’espoir, hein ? »

« Bon je ne sais pas. C'est utile en tout cas. Bien que je préfère largement ne pas penser, me laisser aller tel une loque humaine, marcher sans raison, respirer l'air salé de la mer. Vogué vers une destination inconnue, c'est tellement plus beau, plus agréable que d'avoir de l'esprit. Tu ne trouves pas ? »

Il l'avais tutoyer, sans réellement le faire éxprès. Josh n'arrivait pas à vouvoyer les gens pendant très longtemps, sentant rapidement s'il pouvait être en confiance avec eux, soit il coupait court et partait soit il parlait comme à son plus vieil ami..

Il semblait… Ailleurs. Pris dans d’autres vents, elle avait l’impression que sa pensée voguait librement, sans jamais réellement s’éloigner. Il venait de poser son appareil, n’ayant manifestement pas peur que l’eau l’atteigne, ou que le sable s’y incruste. Son regard se baladait, sûrement aussi volatile que sa pensée, et ses mains étaient plongées dans le sable fin. C’était un tableau à peindre. Mais elle ne peignait pas. Il lui répondit d’un ton amusé une phrase sur laquelle elle passa sans répondre. De toute façon, il ne tarda pas à reprendre la parole là où elle l’avait laissé.

« Bon je ne sais pas. C'est utile en tout cas. Bien que je préfère largement ne pas penser, me laisser aller tel une loque humaine, marcher sans raison, respirer l'air salé de la mer. Vogué vers une destination inconnue, c'est tellement plus beau, plus agréable que d'avoir de l'esprit. Tu ne trouves pas ? »

Une tirade. Elle sentit qu’elle avait vu juste. Ses mots étaient les mêmes que l’impression qu’il dégageait. Quelque chose de présent, d’insaisissable, d’un peu profond sans être vertigineux ni étiré en longueur. Il l’avait tutoyé, mais elle n’y avait pas réellement fait attention. Et quand bien même ce serait le cas, elle n’aurait pas changé pour autant son vouvoiement. Il lui semblait de mise, d’autant plus qu’elle était certaine de l’avoir déjà vu à Earth Sprite. Qui dit adulte à EA dit professeur. Réfléchissant, elle posa son regard sur l'horizon.

« Se laisser aller tel une loque humaine… »

Elle avait repris ses propos, distraitement. Elle reporta de nouveau son regard sur lui, et reprit, sur un ton de reproche qui, sans être agressif, n’en restait pas moins sérieux.

« Je trouve que c’est… moche. On peut se laisser aller sans être une loque humaine. Pourqu… »

Lou hésita un instant. Elle se doutait qu’ici, beaucoup d’élèves se lâchaient, se laissaient aller pour exercer leur Art. Mais ce qu’elle ne savait pas, c’était si son but à lui était ainsi exprimé, ou s’il n’avait pas trouvé de meilleur mot. Elle décida de faire un geste dans l’air, signifiant en gros : Laissez tombez, je raconte n’importe quoi. On ne s’aventure pas sur les sentiers où les autres comprennent quelque chose qui nous échappent. Du moins le préférait t’elle.

« Oui… Mais… Savoir où l’on va, ce qu’on veut, ce que l’on est, est aussi bien. Tout dépend des points de vue. C’est juste plus difficile. Je pense que n’importe qui peut aller et venir au hasard et prétendre à la tranquillité. Fausse. Pour moi, ce sont deux mondes différents. L’Art, et la Réalité. »

« Se laisser aller tel une loque humaine… »

Avait il choisit les bons mots ? Il était un fait, Josh laissait couler les mots sans réellement y faire attention, si bien que la plupart de ses pensées restaient à moitie exprimées, laissant planer le doute autour de lui. Ce qui lui avait d'ailleurs valu sa réputation d'artiste rêveur. Il aimait ça, laisser les gens réfléchir ardemment sur une phrase sans intérêt qu'il venait de dire. Il aurait voulu réagir, rectifier sa phrase, mais une flemme sans pareil s'empara de son être, si bien que même les mots étaient une difficulté. Se laissant aller, Josh attendit que la jeune inconnue continue sa phrase.

« Je trouve que c’est… moche. On peut se laisser aller sans être une loque humaine. Pourqu… »

Un moment d'hésitation.

« Oui… Mais… Savoir où l’on va, ce qu’on veut, ce que l’on est, est aussi bien. Tout dépend des points de vue. C’est juste plus difficile. Je pense que n’importe qui peut aller et venir au hasard et prétendre à la tranquillité. Fausse. Pour moi, ce sont deux mondes différents. L’Art, et la Réalité. »

Elle avait raison d'une certaine manière, Josh en convenait. Ce n'était pas pour cela qu'il allait changer sa façon de penser certes, mais il était d'accord avec elle. Josh ne rechignait pas à avouer ses erreurs, il n'avait pas vraiment d'égo ni de considération personnelle qui l'empêchait de voir les choses objectivement, il aimait la simplicité – ce qui se ressentait dans ses photos – et la pureté.

« Quel intérêt y a-t-il à chercher un attrait à la réalité ? Puisque nous vivons dedans. »

Il avait penser à voix haute, ce qui lui avait cette fois valu d'exprimer parfaitement sa pensée. Il était un fait, Josh avait bien plus de considération pour le monde imaginaire – qui ne l'était pas pour lui – que pour la réalité. Tournant sa tête vers la jeune fille.

« Tu as raison d'une certaine manière. Mais j'estime que la réalité n'est là que pour pousser l'humain à aller plus loin, à la transcender. Je ne peux concevoir que l'imaginaire soit totalement irréel, comment l'esprit peut il visionner quelque chose qui n'existe pas. Ainsi j'estime que la réalité et l'Art se confondent, ce ne sont que deux parts d'une même chose, l'existence.
C'est une alchimie à constamment équilibrer. »

Se redressant légèrement, Josh ajouta.

« Au fait, moi c'est Josh Arey, photographe professionnel et prof de photo à Earth Sprite. »

[!] Ma réponse contient des OGM --' Ne vous exposez pas inutilement...

« Tu as raison d'une certaine manière. Mais j'estime que la réalité n'est là que pour pousser l'humain à aller plus loin, à la transcender. Je ne peux concevoir que l'imaginaire soit totalement irréel, comment l'esprit peut il visionner quelque chose qui n'existe pas. Ainsi j'estime que la réalité et l'Art se confondent, ce ne sont que deux parts d'une même chose, l'existence. C'est une alchimie à constamment équilibrer. »

Elle était restée silencieuse tout au long de la tirade. Elle avait commencé par dessiner un grand rectangle, aux bords légèrement arrondis. Il faisait bien dix centimètres de large pour trente de haut. Le sable se pliait à ce que ses doigts lui ordonnaient, tandis que des lèvres de son interlocuteur se déversaient des mots, et des mots. Le visage qu’elle esquissa à l’intérieur du cadre n’avait rien de beau, et pourtant, sa laideur était belle à sa façon, le sable créant des nuances nouvelles. Ils finirent en même temps. Lui, de parler, elle d’esquisser. Dans un léger silence, elle traça dans le sable ces lettres, à coté de l’image…

J
O
K
E
R

Un sourire vint se poser sur ses lèvres.

« Au fait, moi c'est Josh Arey, photographe professionnel et prof de photo à Earth Sprite. »

« Enchantée, Lou Einigan, élève professionnelle à Earth Sprite. J’aime la mousse au chocolat et la musique, je suis née le 10 Octobre, je suis balance et en conséquence, je suis complètement timbrée et j’aime les gens qui débloquent complètement, j’aime les trucs has been, je préfère les dragibus noirs, et la seule chose qui me rend triste, c’est la que les cartes de visites soient trop petites pour contenir toutes ces informations, et bien d’autres encore dont je ne vais pas plus vous abreuver. »

Elle se tut un instant et reprit sa respiration.

Ca te prend souvent ?
Oui.

Après, on peut se dire : Elle n’osera jamais se présenter aux cours de photographie. Hey, se serait mal connaître Lou. Vous croyez vraiment que ça la gêne de débiter n'importe quoi à n'importe qui ?? Elle posa son regard sur les vagues, jouant avec le sable de ses mains, et rajouta, distraitement…

« En fait… Je crois qu’aucune de ces informations ne vous a apporté quelque chose. Je dirais même plus que vous ne les avez pas retenues. Et que si c’est le cas, vous allez rarement vous en servir. »

Si elle parlait de la liste des trucs inutiles qu’elle lui avait sortit, elle incluait également son prénom et ce qu’elle faisait. Ce n’était pas des choses intéressantes. Un jour, il regarderait le trombinoscope de la classe et il tilterait : Ah oui, c’est bien son nom. Mais au fond, maintenant, il ne servait à rien. Elle aurait fait pareil le jour du cours. Il l’aurait marqué au tableau, et elle aurait reconnu le nom. Point final. End.